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18 novembre 2009 3 18 /11 /novembre /2009 20:20
Monsieur et madame Capi appellent à 18 H  et arrivent à 18 H 50, avec Poupy, berger allemand de neuf ans de son état, qu'ils suspectent d'avoir été empoisonné.
À ce stade, j'ai le choix entre une consultation d'iguane ou Poupy je "prends" celui-ci.


Monsieur Capy passe déjà plusieurs dizaines de secondes à le museler. Je m'impatiente un peu à part moi, il est tard et je voudrais bien rentrer, moi, donc si déjà on perd du temps AVANT la consultation proprement dite... Mais bon, si muselière il doit y avoir, allez-y monsieur, et mettez la bien, surtout.

Poupy est fort fatigué, il respire mal, il a vomi deux fois.
Son abdomen me parait distendu, wouhoups. Il tient à peine sur ses pattes, il n'a pas de fièvre, le coeur bat en désordre complet.
Puisqu'ils sont là, monsieur et madame Capi en profitent pour m'exposer en détail les soucis cutanés de poupy qui il est vrai présente une fort vilaine dépilation séborrhéique et de petites masses un peu partout (dermatofibrose nodulaire ? J'en ai vu une une fois, ça laisse des souvenirs...).
Je les écoute d'une oreille distraite (j'ai déjà dans l'idée que les problèmes de peau de mister BA ne sont que le moindre de ses soucis actuels) en récapitulant dans ma tête les conclusions de mon examen clinique et en sériant mes priorités.


Photo trouvée ici


Je leur explique que les symptômes de Poupy peuvent être liés à un problème gastro-intestinal plus ou moins associé de complication métaboliques au niveau du foie et des reins et que par ailleurs son coeur bat la chamade ce qui dit de façon moins poètique signifie que c'est le wye complet à l'auscultation, bref qu'on a un problème sérieux de ce côté là. Et que donc je vais devoir garder Poupy pour effectuer un bilan sanguin, une radiographie abdominale et un électrocardiogramme ou peut-être une échocardiographie.


Au chenil où je traine Poupy qui malgrès son épuisement manifeste un désaccord certain même si non agressif  pour l'hospitalisation je croise Marisa ma collègue véto qui me demande joyeusement si je m'y connais en iguane.
-- "Euh, écoute, lui je me demande s'il ne nous fait pas un SDTE et il a un rythme cardiaque à faire peur, je pars pour radio-PS et il faudrait qu'on le passe en échocardio tout à l'heure, alors l'iguane, ce sera sans moi...."
Le joli visage de ma collègue s'allonge un peu " Flute, et il y a aussi Bout'chou (elle me désigne le setter de dix ans squelettique qu'elle a hospitalisé le matin) qui passe au bloc tout à l'heure, il est en occlusion, j'attends juste l'accord de la propriétaire."
-- "Voui.... M'enfin si celui-ci est en torsion...." (et là dans ma tête je me fais l'effet d'une ménagère se disputant avec une autre dans la file d'attente avant la caisse "J'étais avant vous !!!" "Non ! C'était moi la première !") Quoi qu'il en soit, Marisa concède facilement :
-- "Oui, bien sûr, s'il est en torsion il passera en premier."
Chouette, j'avais justement envie de faire de la chir jusque minuit. Si, si, je vous jure.


Avec Coralise l'ASV on fait la radio -- soulagement, c'est pas une torsion -- et puis la PS et on emmène Poupy en salle d'écho. Au bout de tout ça, je sais que la muselière est à priori superflue. Peut-être parce qu'il peine à respirer, à se tenir debout, parce que son coeur peine à amener l'oxygène dans le corps, Poupy se comporte avec une gentillesse remarquable.

Sur la table en écho il s'agite, les pattes débordant de la table, cherchant une position plus confortable sans la trouver.
On attend Marisa qui doit pratiquer l'échocardio  et j'aimerais bien qu'elle arrive, que je puisse poser ce malheureux toutou  en cage et le laisser se reposer. Elle est dans la salle d'à côté en train de discuter avec un client et je prends le risque de lâcher Poupy une seconde pour me glisser à la porte et lui demander par signe de se dépêcher.

Et puis l'échocardio faite, Marisa emmène Poupy en salle technique où elle lui pose un cathéter-une perfusion, lui fait prendre des gélules de Vet....d..n et de la D..g..X..ne et encore d'autres trucs.

A moi le douteux privilège de rappeler monsieur Capy pour lui expliquer que l'état de son chien est trés précaire et que, en gros, on craint qu'il ne passe pas la nuit. (Finalement il connaîtra une rémission de quelques semaines avant un décés on l'espère en douceur dans la nuit chez lui)
Durant ce temps la maîtresse de Bout'Chou a rappelé, elle ne souhaite pas que son chien soit opéré mais tenter encore de faire rétrocéder le problème de façon médicale.



Bon, ben finalement keskon fait ? Ah ? On a fini-on peut rentrer ? Et ce alors qu'il n'est que 20 H30 ? Wahou. OK. Dépêchons-nous de filer avant qu'un contre-ordre ne survienne, alors.

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7 novembre 2009 6 07 /11 /novembre /2009 21:39
Oui, qui a dit que les animaux n'étaient pas reconnaissants ?
Poule amenée pour soigner  une
vilaine plaie à la nuque.



Plumage des abords de la plaie
, soins locaux, prescription d'antibios et de soins de base. Nous gardons la bestiole sur une journée le temps que ses maîtres reviennent la chercher et dans la journée....



Z'avez vu le zoli cadeau ??? 

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13 avril 2009 1 13 /04 /avril /2009 19:59
- Petit     moins  /  Ce soir, bien fatiguée.

+++                             Normal plus  :-)   /                  Ce soir   on termine tôt.

-------    trés trés moins moins :-(((((   /  La plaie de Pongo, adorable croisé basset fauve de Bretagne que j'ai suturé il y a près d'une semaine, est en train de trés mal évoluer.
Quand il me l'a amené, son maitre m'a dit qu'il croyait qu'il s'était bagarré avec un autre chien. J'ai jeté un coup d'oeil au chien dans le coffre de la voiture, j'ai vu un petit trou en zone inguinale, un chien sur ses pattes, vif et muqueuses roses, donc il a attendu, il est passé après le chien de monsieur et madame vieuxchiants qui n'avait pas grand chose mais qui était arrivé avant et dont le maître m'avait déjà engueulée au téléphone parce que je n'étais pas de la région et que je ne savais pas lui indiquer le chemin de la clinique. Ben oui.
Après quand je l'ai fait rentrer [Pongo], j'ai vu que ça saignait quand même pas mal,
alors j'ai préparé la salle de chir vite et noté vite aussi les coordonnées du maître.
Il y avait un petit trou saigneux en inguinal, un gros décollement cutané. En explorant, je me suis dit "Pfft, y'a rien." et puis plus en arrière, j'ai découvert les muscles de la cuisse.
De la charpie.
Je ne savais même pas quoi suturer avec quoi, c'était tout en bouillie, ça saignait de partout, des fois en nappe, des fois en jolis bouillons bien tourbillonants. A un moment je me suis dit   OK j'y arriverai pas seule  et j'ai appellé Blancheline l'ASV et puis j'ai remis les gants et elle aussi quand elle est arrivée. J'ai fait de mon mieux et mis un drain. Qui depuis n'a pas cessé de puruler malgrès les antibios et les rinçages désinfectants.



Là, les sutures sont en train de lacher, il y a de l'oedème sur toute la patte, d'énormes hématomes, du pus sous la peau et  Pongo ne se sert pas de sa patte.

Je le soigne matin et soir. Il est couché sur la table, maintenu sur le côté par une des ASV, gentil et docile (oui bon, l'IV de morphiiiine juste avant ça aide mais il est quand même super gentil) Et moi je lui fais ses soins et je vois l'évolution avec un sentiment croissant de gâchis et un zeste de panique. Qu'est-ce que je pourrais faire pour enrayer cette évolution ??  Qu'est-ce que j'aurais dû faire différemment ?

...  Bon, je vous épargne la litanie... Des "j'aurais pu faire ci"... "Oui, mais..."


Oui mais j'ai fait comme j'ai fait.
Est ce que ça aurait changé quelque chose ? Là, je pense que c'est l'euthaaaanasiie qui nous pend au nez pour le mignon Pongo  je vois pas trop quoi envisager d'autre  et quand je me dis ça, je panique un peu.   J'essaye de me dire que j'ai fait de mon mieux au moment où j'étais en situation, que  ce n'est pas d'avoir fait çi  au lieu de ça qui va faire la différence, que peut-être ça aurait fait pareil si j'avais fait comme ci et non comme ça, mais, bon, voila, j'aimerais mieux ne pas avoir à me poser ces questions...
Le gentil Pongo remis dans son boxe, je passe au reste de la journée. Le monde ne s'arrête pas de tourner...




+++++                      Sourire du soir  /                            Ce soir, au moment où Gwendal, mon employeur avec qui j'ai fait la semaine en l'absence de son employée, s'en va, je lui signale que la porte du chenil est de plus en plus dure à fermer.

Il me répond qu'il y a une technique, il va me montrer et il appelle aussi les deux ASV pour qu'elles écoutent
.
Il sort en nous laissant à l'intèrieur et commence sa démonstration en nous parlant à travers la porte. Mélisandre l'ASV brune et Blancheline la blonde sont à côté de moi et commencent à délirer, ce qui fait que déjà je n'entends rien.

"Et voilà, c'est fermé" termine-t-il triomphant mais d'une voix étouffée par la porte qui nous sépare  et Mélisandre lui répond malicieusement "D'accord, Docteur, on a bien compris, vous pouvez rouvrir" tout en pesant de tout son poids avec l'aide de Blancheline pour l'en empêcher. Je vois qu'il essaie d'ouvrir, et à côté de moi les deux sont suspendues à la poignée de porte comme des gamines malicieusesc'est con et gamin mais c'est drôle, je commence à exploser de rire le plus discrètement possible

Il lance de l'extérieur "oh, vous arrêtez vos sornettes ?"et elles lui disent innocemment "Quoi, Docteur, on n'a rien fait, et vous, c'est aujourd'hui ou demain que vous rouvrez ? Parce que là, c'est tout ce qu'il y a de plus fermé."

L'instant d'après il parvient à rouvrir et se retrouve devant les deux nénettesBlancheline la toute jeune blonde à la coiffure hyperstructurée, maquillage précis, minijupe et talons, je ne sais comment elle fait pour travailler dans cette tenue, avec ça hyper pro et efficace  -- Mélisandre la brune un peu plus âgée que moi, douce avec ses cheveux noirs et ses jolis yeux bleus, maternelle et pétillante -- aux mines malicieusement innocentes et moi --  mon pantalon pas tous propre parce que voilà, c'est la fin d'une bonne grosse journée et j'ai bossé, ma p'tite blouse verte avec mon tee shirt rouge vif dessous,  mes cheveux que je viens de dénouer et dont les boucles reprennent leur liberté en douceur --  pliée en deux comme il ne m'a jamais vue.

Gwendal a dans les cinquante ans, chatain clair grisonnant aux cheveux courts, les yeux bleus, toujours mal rasé, il est très séduisant. Lui, Mélisandre et Blancheline travaillent dans une bonne ambiance à laquelle je me suis facilement jointe et se taquinent beaucoup. Et quand il commence à sourire, c'est contagieux, j'ai envie de rire rien qu'en le regardant.

Il nous regarde un peu surpris mais déjà rieur et  restant dans son rôle   enchaîne en nous disant je ne sais plus quoi au sujet de la porte, il y a des cliquets -- je ne sais même pas ce dont il s'agit -- qu'il faut bien enclencher par derrière, Mélisandre opine avec componction en alternance avec Blancheline et moi je suis toujours pliée en deux et hoquetante, je parviens tous juste à lui souhaiter une bonne soirée quand il s'éloigne en rigolant.


Il vaut mieux ça que de pleurer.



-------                     Edit du lendemain : ce soir, injecté le produit rose qui soigne tout  dans la perfusion de Pongo  avec un calin sur son museau à la barbe emmêlée, en lui souhaitant de  dormir
bien, longtemps
 et l'espace de quelques battements de coeur il était parti
.






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3 avril 2009 5 03 /04 /avril /2009 18:53
Il est est deux heures du matin, dans le chenil de la clinique des docteurs Gwendal et Brandon.
Tanker est couché sur le flanc dans sa cage. Il hurle de douleur depuis des heures. De douleur ou d'angoisse ? C'est à se demander. Il a été opéré par mon collègue le docteur Marisa en début d'aprés midi, d'une énorme masse costale. A mi chirurgie, le trou était énorme et, la tumeur envahissant les muscles, il a fallu sectionner en partie les masses musculaires : on savait d'emblée qu'il allait souffrir.
C'est d'ailleurs en partie moi qui ait suturé, soigneusement, plan par plan, et le résultat est joli.
Tanker s'est doucement réveillé et comme prévu, il a mal.
C'est un chien mâle de race croisée ; il parait énorme mais ne pèse que 32 kg. Gris bringé à poil ras, il a dans les douze ans, des yeux bleutés par la sclérose cristallinienne, ses oreilles triangulaires, larges et battantes au vent  évoquent celles d'un porc, son museau au tour blanchi par l'âge n'a aucune forme, il est moche mais
Je lui ai administré les doses maximales admises à ma connaissance de mooorphiiine et on lui a mis de la K..t..m..ne à micro-doses en perfusion pour soulager sa douleur.
Pourtant il geint, et hurle sans cesse.
Insupportable. Ses cris [car il s'agit bien de cela]  me vrillent les oreilles, d'autant plus dans le silence de la nuit -- tout à l'heure, quand on courait partout dans la bousculade des consultations du soir, je l'entendais moins.
Et je ne vois pas quoi faire pour le soulager.
Pour la énième fois, je le retourne  doucement -- pourquoi se recouche-t-il sans cesse sur sa plaie chirurgicale ? -- et pose une main amicale sur son torse très trés largement tondu -- c'est moi qui l'ai tondu, je pensais que
Marisa aurait besoin de faire un lambeau de glissement ou quelque chose comme ça, et puis, ça ne veut pas partir, même aprés wouatmille années de pratique, à la Vieille Maison on m'a appris à tondre LARGE et à détester les poils, je pense que je le garderai toute ma  carrière.
Il cesse de geindre, relève vers moi une tête aux yeux égarés et remue mécaniquement de la queue. On dirait vraiment qu'il se demande ce qui lui arrive.

Je le caresse doucement durant quelques minutes. Il est vraiment pas beau  mais sympa, il remue de la queue et reste silencieux tout le temps que je le caresse.
"Allons, il faut dormir, bonhomme, ça ira mieux demain..." Mais dés que je referme la porte de sa cage, il recommence à hurler de plus belle. Vraiment à se demander si il a mal ou s'il angoisse. Peut-être les deux...
Je suis fatiguée, je dors au dessus de la clinique et je n'ai bien sûr pas encore pu dormir alors je craque et comme  Gwendal me l'avait conseillé avant de partir je lui injecte une micro dose de sédatif.
En cinq minutes il ronfle paisiblement -- Oh, bienheureux silence qui s'étale doucement autour de moi   --  dans sa cage et je vais me coucher.
A cinq heures ses hurlements m'éveillent à nouveau.
Bon. Ben de toutes façons j'avais bien besoin d'une looooooooooongue douche...
Finalement, il se calme dans la journée et part en presque bonne forme le soir même.
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30 mars 2009 1 30 /03 /mars /2009 20:17
Mr Gc arrive en plein aprés midi, après avoir appelé, quand même. Il a retrouvé son chien, perdu une semaine auparavant, en forêt, pris dans un collet.
Quand il arrive, Malicia l'ASV est à l'arrière de la clinique, moi au bureau dans ma salle de consult et je vois ce chien se pointer tout seul et puis son maître derrière.
Je n'étais pas avertie de sa venue, et ça n'aurait pas changé grand chose. Je lui demande gentiment de rattraper le chien qui n'est pas en laisse  et de passer d'abord par l'accueil  avant de passer en salle de consultation.
Il commence immédiatement à râler.
C'est la première fois qu'il amène le toutou donc Malicia arrivée entre temps et moi voulons prendre ses coordonnées pour faire un dossier. Monsieur GC commence  visiblement à s'énerver, son chien a une plaie, c'est quand même pas urgent de faire un dossier, il faut s'occuper du chien avant toutes choses, est-ce que je crois qu'aux urgences on commence par faire un dossier ? Et là, je regarde le monsieur pensivement en me demandant si il a déjà pratiqué les urgences autrement que devant la célèbre série ?

Le toutou, un jeune croisé bruno du jura tout maigre, attend patiemment. Il a certes   une   non "des"  immonde(s) plaie (s) sous le cou, mais on voit bien que, si elles sont "moches" d'aspect, elles ne sont ni particulièrement profondes ni particulièrement surinfectées et  pas d'hémorragie, pas d'état de choc, pas de contexte fort d'urgence.

Une fois sur la table, je l'examine en posant des questions au maître toujours aussi peu  aimable. Le chien ayant mangé, je pense d'abord que je ne vais pas pouvoir l'anesthésier ce soir mais je fais deux injections en précisant qu'il s'agit d'antibiotiques et anti-inflammatoires-anti-douleur-antichoc. Monsieur GC s'énerve, les antibiotiques, on s'en fout !!! Ce dont son chien a besoin c'est d'une dizaine de points de suture et basta !

Oui, monsieur, bien sûr qu'il a besoin que ses plaies soient parées et suturées. Mais sous anesthésie générale, et il n'est pas recommandé d'anesthésier un chien qui a mangé.
Enfin, je ne vais quand même pas lui apprendre ce que c'est qu'un chien, ça fait trente ans qu'il en a, et il l'a montré à un ami toubib donc il sait ce qu'il lui faut !
Et moi je suis docteur vétérinaire et je connais mon travail, qu'il n'essaye pas de me dicter ce que j'ai à faire. Quoi qu'il en soit, je garde son chien, qu'il m'appelle dans deux heures pour avoir de ses nouvelles, bonne soirée monsieur, à tout à l'heure au téléphone.
Gentiment mais fermement reconduit par moi il part - ouf !!! tandis que Malicia met le chien en cage et je me dis qu'il va me faire un scandale si je n'opère pas son chien là immédiatement tout de suite. Donc je l'opère, parce que je sais qu'avec les produits que je vais lui injecter le risque est limité même s'il a mangé.
Et je passe une bonne heure à parer son truc immonde et à suturer.
Antibios, pansement, perfusion parce qu'il est tout déshydraté le toutou.
Dodo en cage.

A dix-neuf heures, le monsieur n'a pas appelé. Lui qui était si inquiet.


Ce matin, le chien que nous avons surnommé Titou va bien. Il a mangé, on lui change son pansement avec Lilangel, la deuxième ASV, une petite brûnette de dix-huit ans très mûre, très bien, adorable, elle le sort pour qu'il fasse ses besoins...
Midi moins le quart, je sens le client qui va se pointer sans prévenir et je lui laisse un message dans lequel je lui explique que son chien va bien et qu'il m'appelle pour que je lui fixe un rendez-vous, histoire que je prenne le temps de bien tout lui expliquer, merci monsieur, à tout à l'heure.
J'arrive à quinze heures moins cinq, pile à l'heure, il est planté au comptoir. Je vais enfiler ma blouse en lui faisant un charmant sourire "Bonjour monsieur, je suis à vous dans une minute".

Je reviens et veux commencer à lui expliquer ce que j'ai fait à son chien. Notamment lui dire que deux petites plaies ont été rassemblées en une plus grande. Parce que, s'il a inspecté son chien sous toutes ses coutures avant la chir ET qu'il est pénible, ça peut avoir son importance.
"Oui ben c'est bon, ça fait trente ans que j'ai des chiens, vous n'allez pas me faire des schémas !" Hmmm, j'avais déjà compris qu'il avait des chiens depuis trente ans et j'en ai pas grand chose à faire mais passons...
Je fixe deux grands yeux bien innocents et bien calmes dans les siens.
"Mais Monsieur, pourquoi est-ce que vous vous énervez sans raison comme ça toutes les deux minutes ?"
Pas de réponse intelligible, il est momentanément calmé.
"Je m'apprêtais donc, monsieur,  à vous expliquer que..."
Je lui explique le traitement et lui précise que je lui ai prescrit un contrôle gratuit je le précise soigneusement dans quatre jours, et je commence à chercher le carnet de rendez-vous...
"Le contrôle c'est pas la peine, je ne viendrai pas. Quoique, attendez, dites-moi déjà pour combien il y en a."
Nous y voila. L'argent, on ne le répètera jamais suffisamment, petit scarabée, est le nerf de la guerre. Je lui fais un charmant et trés joyeux sourire : "Mais vous ferez ABSOLUMENT CE QUE VOUS VOUDREZ, monsieur. En attendant, moi je vous ai prescrit ce contrôle, donc ne venez pas me reprocher d'éventuelles complications. S'agissant de la facture, nous avons...."
Tout en parlant j'ai posé ladite facture sur le comptoir et monsieur GC saute en l'air
"QUOI ! WOUATMILLE EUROS ! Mais vous êtes MALADE, vous ! ça n'en vaut pas plus de deuxtiersdewouatmille !"

"Consultation X euros, anesthésie Y euros, chirurgie Z euros, perfusion U euros, injections W euros, pansement V euros, médicaments T euros, effectivement le total se monte à WOUATMILLE euros. C'est parfaitement justifié vu le temps que j'ai passé à opérer votre chien, monsieur."


Et là, on bloque sur une impasse.
Monsieur GC continue à me dire sur tous les tons que je suis malade, qu'il amène régulièrement des chiens chez le véto, que des trucs comme ça "dix points de suture", il en fait régulièrement à la chasse (au juste, s'il fait les suture lui-même, ce qui au passage constitue un exercice illégal de la médecine vétérinairemais chut, fi de grands mots, bref, je pensais, s'il fait les sutures lui-même, pourquoi donc m'avoir amené son chien ?), qu'à ce compte, il aurait mieux fait de l'amener aux urgences de l'hôpital X. Qu'il ne me règlera pas plus de deuxtiersdewouatmille euros. Que je n'ai qu'à garder le chien, il portera plainte pour séquestration.


Je commence à fatiguer. Des fois, je suis super calme, opérationnelle à 200 %, hyper zen, d'autant plus polie et tout qu'on s'énerve après moi mais.... faut pas aller trop loin.

--  Non, je ne garde pas son chien qui soit dit en passant est adorable, lui,  et ça rattrape un peu le comportement inqualifiable de son maître.
S'agissant de la facture, elle est parfaitement en accord avec les tarifs habituellement pratiqués par mon employeur ET avec le travail que j'ai effectué sur la plaie de Titou. Donc je vais encaisser les deuxtiersdewouatmille euros, lui donner la facture sur laquelle je vais indiquer qu'il reste untiersdewouatmille euros à percevoir et monsieur GC n'aura qu'à discuter du solde de la facture avec mon employeur
.

Ah non non, me dit-il, il règle deuxtiersdewouatmille euros et c'est tout et ça doit être indiqué comme solde de tout compte sur la facture. 

Et alors, là à ce moment précis je craque, là, sous la surface, parce qu'y en a marre de me faire incendier en plein devant d'autres gens qui ne savent pas où se mettre et je n'ai pas pu éviter que ça se passe devant eux   et tout en restant polie, tout en gardant ma petite voix douce qu'on dirait une gamine mais il ne faut pas s'y fier je dis à monsieur GC que ÇA SUFFIT son comportement impoli et désagréable,
         Que  s'agissant du règlement des frais je vais faire  exactement ce que j'ai dit il y a un instant, c'est pas négociable 
             et que s'il sait tout mieux que moi il aurait mieux fait de ne pas m'amener son chien, que ça m'éviterait d'avoir à gérer une personne aussi discourtoise et grossière que lui
              Que j'ai fait du bon travail sur les plaies de Titou, 
               Que mes honoraires (qui d'ailleurs sont encaissés par mon employeur qui me verse ensuite un salaire indépendant de ce que j'ai facturé aux clients, donc je n'ai aucun intérêt à accroitre le chiffre d'affaire, je n'ai pour seul but que de faire mon travail correctement) sont parfaitement raisonnables
               et que pour le règlement du reste de la facture il verra avec mon employeur qui lui se mettra j'espère bien mais je ne le dis pas "si nécessaire" en rapport avec un huissier -- "Lilangel, tu peux amener Titou à monsieur GC ?".

Voilà son chien, qu'il suive bien mes recommandations inscrites sur l'ordonnance, qu'il n'hésite pas à nous recontacter s'il veut montrer le chien en contrôle, bonne journée monsieur au revoir.
Même je souris en lui disant au revoir tellement je suis contente de moi d'avoir gardé mon calme et de l'avoir tout de même remis à sa place.

J'ai une consult tout de suite aprés et puis Lilangel et moi nous retrouvons en salle de consult où elle m'apprend qu'il avait vu le montant de la facture tandis qu'elle lui expliquait les soins qu'il faudrait prodiguer à Titou, et qu'il l'a littéralement incendiée.

Ça, ça me rend furieuse, qu'un client comme ça incendie une ASV [et d'autant plus qu'il s'agit d'une toute jeune fille charmante] pour quelque chose dans quoi elle n'a rien à voir et si je l'avais su avant je lui aurais volé dans les plumes à ce sujet
Mais elle n'est pas traumatisée et me dit en souriant qu'elle a bien aimé la façon dont je l'ai remis à sa place et que je l'ai bien calmé.

Ouai, en attendant je suis vidée, moi, je frissonne de partout et je me sens comme en hypoglycémie et la journée n'est pas finie...

Et ce soir, ça m'a fait du bien de raconter tout ça sur la toile.

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19 février 2009 4 19 /02 /février /2009 20:51

Si, si, je le jure, j'aime les gosses (je précise au passage que pour moi l'appellation "gosses" est  amicale)... D'ailleurs, je l'ai déjà dit, et puis même la nouvelle assistante du Dr K l'avait remarqué.

Mais des fois, il faut s'accrocher.


Mercredi = jour où les gens viennent avec leurs enfants et pour certains leurs petits enfants.

Et aujourd'hui qui n'est pas aujourd'hui parce que je poste toujours en décalé, je travaille justement "chez les fous", une clinique très fréquentée et qui travaille en consultations sans rendez-vous. Y'a des fous partout mais des  fois il faut vraiment être fou pour faire certains trucs, enfin, moi c'qu'j'en dis, hein... 
Chaque fois que je sors de ma salle de consultation —  j'ai bien envisagé d'y rester cloîtrée mais, non, pas moyen — , j'ai des gens partout, des chiens partout, des paniers avec des chats dedans dans tous les coins. Dans la salle d'attente un chien chougne, gémit, pleurniche, aboie et gronde en alternance. Ayant repéré de quelle race il est, je regarde où est son dossier dans la pile. Ouffffffffffff, j'en ai encore pour un moment à ce qu'il me casse les oreilles. Et aujourd'hui, on rajoute des gosses de tous âges, là aussi partout. Et plus ou moins patients, aussi.


Une dame au comptoir est en train d'acheter des vermifuges ["Alors.... Minou pèse 4 kg, Rex doit en faire 20, Sultan, voyons, vous n'auriez pas son poids dans l'ordinateur ? Et est-ce que je prends pour Belle, c'est la chienne de mes parents ? Mais dans ce cas, il y aurait aussi Mistigris et Noiraux...."] a laissé passer derrière celui-ci une loupiotte adorable qui marche à peine et trifouille les placards. Tiphaine la secrétaire signale à la maman que sa fille risque de se pincer les doigts dans les portes et me dit après qu'elle a  été à deux doigts de ramasser la gosse et de la recoller dans les bras de sa mère en lui demandant de s'en occuper un peu.

C'est pas qu'on ne soit pas gentilles mais qui est-ce qui va se sentir coupable si la gosse se fait mal dans nos placards ?

Je fais rentrer en consultation une dame nantie d'un teckel vieux comme Mathusalem au bide énorme et de deux brûnettes plutôt jolies. La plus grande des deux, j'ai déjà cru dix fois qu'elle était avec des clients que je faisais rentrer, parce qu'elle était tout le temps avec un animal différent.
Sitôt rentrée dans la salle de consult avec sa maman, sa soeur et son chien, elle se met sentencieusement en devoir de m'expliquer qu'elle espère que ce ne sera pas comme la dernière fois, dont elle garde un mauvais souvenir parce que son chien avait reçu une piqure.

Ah. J'y sens pas trop, là, si ça commence comme ça. L'ennui, mon petit, c'est que les vétérinaires ont fâcheusement tendance à faire des piqures aux animaux. Je la rassure gentiment : si je peux, je ne ferai pas de piqure (ce n'est guère qu'un demi mensonge) et puis si nécessaire et si elle le veut, elle pourra sortir durant les injections.

Je fais mettre le chien sur la table et commence à discuter avec la dame des troubles présentés. La plus petite des deux filles est relativement sage et silencieuse, l'autre m'interrompt régulièrement et m'entretient de sa passion pour les chevaux d'un docte ton qui laisse penser que c'est elle qui a des choses à m'enseigner sur le sujet. Au début je lui réponds gentiment, en entrant dans son jeu mais j'aimerais bien qu'elle me laisse un peu travailler


La maman et moi-même essayons de garder le fil du sujet, elle en tentant régulièrement et sans succés de faire taire sa  progéniture, moi, en revenant patiemment ou aussi patiemment que possible sans cesse à ce qui me préoccupe, soit la santé du toutou. Parce que si, moi, je devais dire quoi que ce soit à la petite pour la faire taire, je peux vous dire qu'elle se tairait mais ça risquerait de mal passer.

Je pose la capsule de mon stétho sur la face latérale du thorax, juste en arrière de la patte avant gauche de l'animal
L'ainée des deux petites  —  "Comment vous savez où est le coeur ?"
Moi —  "Parce qu'il est toujours au même endroit, sur tous les chiens et les chats".
—  "Et comment on sait qu'un animal est cardiaque."
— Moi, à la petite, gentiment "Hé bien, entre autres lorsque l'on entend des anomalies en écoutant le coeur" et à la maman "et à ce sujet, votre chien, justement, présente des anomalies de l'auscultation, un souffle cardiaque, trés précisément."
J'explique schématiquement le mécanisme de l'insuffisance cardiaque par pathologie valvulaire tandis que la gosse pour l'instant se tait (mais c'est pas mieux elle commence à jouer en tournoyant dans la pièce avec sa soeur, dans quelques instants elles vont tomber et se faire mal et c'est franchement pas trés glop pour le teckel qui aurait bien besoin de calme et de tranquillité. Je suis partagée entre agacement, scredioune, encore une fois c'est quand même pas à moi de les faire tenir tranquilles et puis je ne la trouve pas trés sympathique cette gosse au comportement arrogant et compréhension, elles ont attendu longtemps...).

La mère les apostrophe, quant à moi je reviens patiemment une fois de plus au sujet et  propose un bilan sanguin (ce ventre de chien me parait plein de liquide.... Ascite d'origine cardiaque ou hépatique ou .... ?)

—  "C'est maintenant que vous lui faites une piqure ?" interrompt la gosse tandis que la mère m'explique qu'elle tient beaucoup à son chien mais qu'il est âgé et elle voudrait un devis. Donc, non, c'est pas maintenant la piqure, je vais aller regarder les tarifs, hein...


Le devis réalisé, la mère accepte le bilan sanguin, la gosse décide d'aller attendre dans le couloir. En sortant, elle éteint la lumière des spots et disputée par sa mère, le plafonnier en voulant rallumer les spots. Elle rembarre sa mère d'un "Je ne l'ai pas fait exprès !" péremptoire ["Ben fallait faire exprès de ne pas le faire" me dis-je une fois de plus partagée entre rire et agacement  --   et soit dit en passant j'aimerais pas qu'une gosse me parle sur ce ton là]

Quelques instants après lorsque je sors pour aller chercher mes tubes à prélèvements, elle est juste derrière la porte et je manque la renverser.
— "C'est fini ?"
Euh, non, je t'explique, c'est pas encore commencé... Je peux travailler tranquille un p'tit peu ??

Si, si, je vous jure, j'adore les gosses....Image trouvée ici.


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9 février 2009 1 09 /02 /février /2009 18:51
Je suis crevée, je n'ai pas dormi de la nuit .

Je suis bien installée sur mon nouveau lieu de rempla -- des fois je me fais l'effet d'un Géraard Kleein dans l'instiit sauf que j'ai plus de bagages que lui. 
Deuxième jour de boulot.
Une emm...se venue m'emm... (désolée pour les gros mots, je dirai trois pater et un ave, promis)  simplement parce que je suis jeune (beaucoup trop jeune pour être compétente, manifestement), jolie et pas le Dr Docteur.
Bout de dialogue : "Vous comprenez, madame... Ou mademoiselle ?"
-- "Docteur. Je suis docteur vétérinaire, vous pouvez m'appeler "docteur"".
-- "Oui, donc, vous comprenez, mademoiselle"
...

Mais j'ai été gentille parce que je lui avais rendu son chien agonisant (elle ne voulait pas le faire euthaanaasier) et que, bien sûr, il était Delta Charly Delta durant le week-end (euthaanaasié chez le vétérinaire de garde pour être exact) et ce chien c'était toute sa vie, c'était triste, bien sûr. Mais je n'en étais pas non plus responsable, il était à bout de souffle et elle le savait on lui avait dit le Dr Docteur et moi  sauf que bien sûr elle ne voulait pas le voir, enfin bon...

Un sourire ce soir  : Je rappelle un client (tout jeune homme fort sympathique au demeurant) pour préciser un point sur lequel je n'ai pas été claire et tombe sur un répondeur sur lequel une adorable voix de gosse toute mignonne dit "Gilles il est pas là alors laisse lui un message !".
Je n'ai pas résisté : j'ai laissé mon message et ajouté que son annonce de répondeur était originale et craquante.
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23 janvier 2009 5 23 /01 /janvier /2009 01:28
Honorés lecteurs, si vous voulez à terme conserver votre appétit, ne lisez pas ce qui suit... Certes cet avertissement est rédigé en petites lettre difficilement lisibles sans microscope binoculaire mais vous voici prévenu, aucune plainte ne sera désormais recevable et on est prié de ne pas vomir sur son écran !!!
Je travaille actuellement dans une région de chasse notamment à courre.
Sans transition, voici Porlock (Coucou Porlock !!!).



Beagle de son état, faisant partie d'une meute de 150 chiens, 7 à 13 ans au compteur, j'avoue l'ignorer, tout maigre (juste en arrière de la dernière côte, de chaque côté, ça fait un gros creux. Vu de dessus, il a une sillouhette en trognon de pomme) tout sec, ce qui fait que même sous perfusion depuis hier on a l'impression qu'il est déshydraté.
En pleine tentative de fuite au moment de la photo, certes modérée
(c'est un chien très poli) puisque l'on voit que je ne le retiens que d'un doigt mais tentative de fuite il y avait bien.

Donc Porlock a été présenté hier soir à mon employeur le Dr Docteur par un ami de celui-ci.

Bel homme brun souriant, la trentaine, habillé de bottes de cheval, culottes de cheval blanches et veste noire. La classe. J'en ai déduit qu'il rentrait de la chasse.
Le Dr Docteur a hospitalisé Porlock et m'a fait partager ses découvertes au passage.
À la palpation abdo, une impression de corps étranger (CE), petite masse tubulaire de 3 cm de diamètre sur 4 cm de long, trés caudale.
À la radio, plein de bulles d'air signant l'arrêt du transit et pas de CE visible. Soit c'était une crotte, soit c'était un CE radiotransparent.
Bon. Chien en cage sous perfusion, traitement symptomatique, baryte ou pas baryte, le Dr Docteur décide que non et donne à manger à Porlock pour voir. Celui-ci se jette sur la nourriture. Bon.

Ce matin le Dr Docteur est malade et me fait passer par son ASV une liste de consigne concernant Porlock : Bien l'examiner (Ah bon ??), le faire marcher pour voir comment il est (J'y aurais pas pensé non plus), lui refaire ses antibios (Re) et entretenir sa perf (Re, re... Heureusement que le dr Docteur était là pour m'expliquer comment travailler !!), lui refaire une radio.

Porlock est un chien poli
(
Je l'ai déjà dit mais c'est suffisamment rare pour être noté) donc quand je lui parle il remue gentiment son bout de queue et se jette sur la nourriture que je lui présente ultérieurement. Il semble timide et quand je l'invite à marcher se statufie sur place. [Hum hum, à d'autres mon garçon, ne va pas me faire croire que tu étais timide à la chasse l'autre jour...]
Cliniquement parlant, il n'est pas si mal que ça : Posé sur le sol de la salle de consult tandis que je nettoie la table, il commence à explorer sans se soucier de sa tubulure de perf. [Dis donc toi, je t'ai autorisé à bouger ? Non, n'est-ce pas ? Donc tu ne bouges pas.
]
Il est calme donc on fait la radio sans souci.
Il est toujours balloné à la palpation et sur la radio, il y a une perte de contraste qui me fait craindre une péritonite.
Le Dr Docteur joint par téléphone [au bout de trois jours j'ai bien capté que "quand il ne connait pas" dixit son ASV il n'a pas confiance] me dit que si il n'est pas si mal que ça, il verra demain.
Bon. Ça, c'était ce matin.
Porlock a passé toute la journée tranquille en cage, sans bouger sauf quand on l'a sorti. Toujours poli et remuant son bout de queue quand on lui parlait.

Ce soir, je suis restée tard à la clinique, faire des choses et d'autres.
Porlock a commencé à s'agiter dans sa cage, je suis allée le voir, qu'est-ce qu'il peut bien avoir ? Sa gamelle d'eau est trop petite, elle doit être vide, et puis faut que je change la perf, me dis-je en allant au chenil.
Oui pour la perf, non pour l'eau, il en a encore, je lui mets quand même une gamelle plus grande.
Une caresse sur la tête et je l'avertis que si c'est pour aller se ballader c'est niet-nitschkaya-il-est-trop-tard.


Quelques instants après il s'agite encore. S'agite. S'agite.
Il me fait des convulsions ou quoi ? Je retourne au chenil et le retrouve penaud dans son boxe sans dessus dessous et repeint de brun coulant nauséabond.
Ah ! C'est bien des selles, au moins,  pas des vomissements fécaloïdes ? Je regarde prudemment mon bestiau à l'avant et à l'arrière, oui oui c'est bien des selles.
"Mais c'est bieeeeeeeeen loulou !" Et me voici à minuit dans mon chenil en train de féliciter chaleureusement  un beagle miteux et penaud qui se demande quand même si je ne suis pas tombée sur la tête de m'avoir entièrement souillé et empuanti son boxe. N'importe nawak. 
Puis après il faut nettoyer, malheureusement.

Corps étranger retrouvé dans les selles : une sorte de pellicule de plastique épais plissé.
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22 décembre 2008 1 22 /12 /décembre /2008 20:46
Ce matin, Naïade l'ASV du Dr Kprime (qui est logiquement l'époux du Dr K) et moi, en train de regarder le planning, à mon arrivée (en retard, comme d'habitude, comme si je ne pouvais pas intégrer qu'il me faut plus d'un quart d'heure pour traverser la moitié de L en voiture, faire trente km d'autoroute et traverser la moitié de R....).

Naïade "Donc, à 9 H, un lapinje ne sais plus pourquoi la dame vient. 9 H 15, une euthaanisiee de chienne malade depuis des mois. 9 H 30, un chat au bout du rouleau...."
Moi "Deux euthaa coup sur coup ? Ben ça va être joyeux, ça !"
Naïade, un peu embêtée "Euh.... le chat, j'ai dit ça à cause de ce que la dame me décrivait au téléphone... Sinon je ne sais pas pourquoi elle vient. On a vu le chat l'autre jour avec le Dr Kprime, il a une hépatite"

Coup d'oeil sur le dossier que le Dr Kprime  a complété, sur les résultats de prise de sang, pourtant pas catastrophiques, l'âge du chat, huit ans, bon.


À 9 H 30 (ayant donc euthaanasiée une première chienne, ce dont vous vous souvenez certainement  qu'il ne s'agit pas d'une de mes missions préférées)  je fais donc entrer une jeune femme blonde toute simple et fort jolie nantie d'une boite à chat, d'un couffin dans lequel dort très profondément un très jeune bébé et d'un petit garçon entre un et deux ans à vue de nez.
Le couffin est soigneusement posé sur une chaise et la boite sur la table.


J'en extrais sans difficulté Minet un grand, grassouillet comme beaucoup,  et beau chat roux tabby.
Digression : Les vétos aiment les animaux — au moins au début de leur carrière — mais les animaux ne les aiment généralement pas. Tout chat connaissant le vétérinaire et normalement constitué est donc dès son arrivée dans nos locaux fermement  opposé à toute sortie de sa boite. Il faut donc souvent pratiquer ce que je surnomme "l'extraction aux forceps" : une personne prend la peau du cou et tire lentement mais surement et sans se laisser amadouer par la résistance tandis qu'une autre retient la cage. Il faut généralement soit retirer complètement la porte soit passer sa seconde main à l'intèrieur pour retirer la patte arrière qui dans une dernière  tentative désespérée d'échappatoire est coincée derrière la dite porte.
À raconter ça comme ça, je ne vais pas me faire des amis parmi les vétos spécialistes des chats dont je suis sûre qu'ils sont bien plus doués que moi pour inspirer confiance aux chats et les faire sortir de leur cage. Tant pis j'assume.


Tout ça pour dire que lorsque Minet tenu par la peau du cou se laisse aller sur la table comme un sac de patates, une petite alarme interne "oh oh, chat pas bien du tout" se déclenche.

Minet sur la table reste couché en décubitus sterno abdominal, les yeux  haves et creusés, inerte. Le pli de peau soulevé pour estimer le degrés d'hydratation reste en l'air, ses muqueuses oculaires et buccales sont oranges (orange = rouge donc déshydratation  + jaune dû à l'hépatite) et sèches. Au bout de quelques instants il tourne très lentement la tête pour regarder tout autour de lui et pousse sans raison évidente une série de miaulements très sonores, lents, égarés, plaintifs, déchirants. LE style de miaulements que tous les confrères-consoeurs reconnaîtront et qui déclenche la deuxième alarme interne "chat agonisant".

La dame a posé son fils sur la table, elle le tient
et le cajole d'une main tout en caressant Minet de l'autre et attend patiemment que je termine mon examen clinique. Elle vient de m'apprendre que Minet n'avait rien mangé du week-end et qu'il avait vomi noir ce matin. Noir.

Bon, bon, bon. Autant y'a des fois où on n'est pas sûr, autant là, il va falloir être clair...
Mon thermomètre électronique sonne, le résultat est celui que j'attendais et délibérément je prends une mine sombre en le reposant "Sa température est infèrieure à 32 °C".
— "Ce n'est pas bon ?" me demande-t-elle en se décomposant.
— "C'est malheureusement très mauvais...."
Elle éclate en sanglots tandis que je commence à parler. Au bout de quelques minutes, une décision d'euthaanisiee est logiquement prise — elle s'y attendait... Je lui dis fermement qu'elle ne peut pas assister à l'acte étant donné la présence de ses enfants et elle en convient mais souhaite bien évidemment rester auprès de Minet tandis que Naïade prépare les documents nécessaires. Elle pleure et cajole toujours son chat d'une main, de l'autre le petit garçon qui pose des questions en deux mots que je ne comprends pas et auquel elle dit que Minet va rester chez nous.

Oh, ce regard lourdement accusateur sur moi (la dame méchante qui fait pleurer maman !), oh, cette petite main potelée posée sur la tête de Minet.
—  "Vous savez, madame, je ne suis pas experte en ces domaines, mais votre petit bonhomme perçoit pas mal de choses sur ce qui s'est produit aujourd'hui. Il me parait recommandé de contacter un professionnel, peut-être le pédiatre, pour voir comment lui expliquer ce qui s'est passé."

C'est vrai, quoi. J'y connais rien en gosses, je ne sais pas ce qu'ils retiennent à cette âge, mais si ce petit gars en garde des souvenirs, il retiendra que le vétérinaire est une dame qui malgrès sa 
voix douce (que même on dirait une voix de gamine mais chut ne le dites à personne) fait pleurer maman et chez qui on laisse Minet et après on ne le revoit jamais. En voilà un qui est perdu pour la Profession. À la base on est quand même là pour soigner, donc bon.

Et puis d'ici qu'une analogie se fasse entre le docteur pour les animaux et le docteur pour les enfants, bonjour l'ambiance lors des futurs séances de vaccination et je ne parle pas d'une éventuelle hospitalisation.
Donc je recommande toujours, lorsque les petits ont assisté à ce genre de consultation, de prendre bien garde à eux. L'idéal serait bien évidemment, enfin, je suppose, d'éviter leur présence en certaines circonstances (mais ça dépend aussi de leur âge, de leur maturité et de leurs désirs en la matière lorsqu'ils sont plus âgés.)


Quelques minutes plus tard, je raccompagne la dame à sa voiture ; elle aide le petit gars à descendre les marches, le couffin, le bébé toujours endormi, dans l'autre main. Moi j'ai la boite vide, j'aurais préféré le couffin.
Elle me remercie, je n'ose pas lui souhaiter de bonnes fêtes, c'est sûr qu'elles ne vont pas être joyeuses. Je dis au revoir à l'enfant et toujours ce regard lourd sur moi.

MÉCHANTE.
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15 décembre 2008 1 15 /12 /décembre /2008 00:22

La saison des stagiaires ! En théorie, j'aime bien les stagiaires —   ce sont généralement des collégiens — quand ils sont intéressés et réactifs, on peut leur expliquer "plein" de choses,  leur faire écouter le coeur des animaux,  les faire participer. Quand on a le temps et qu'ils sont suffisamment doux pour cela, on peut leur faire palper un abdomen de chat sympa et pas trop gras, il y a plein de choses à y sentir (genre, deux reins, un foie, un estomac, des crottes souvent, des fois un ganglion mésentérique, du classique le plus souvent, donc,

et parfois des trucs moins cools — Véto, stagiaire et chat dans le chenil en l'absence du maître : "Tu sens ?" Sourire extatique ou moue consternée selon le degrés de rapidité à comprendre  "oui, c'est quoi ?" "Hum, un truc pas cool, je t'explique..."), on peut leur faire regarder un fond d'oeil, c'est suffisamment joli pour les enchanter.


Nettoyer la table entre deux consultations, ainsi que l'otoscope et ranger ce que j'ai dérangé est leur rôle s'ils veulent me suivre en consultation. Non que je ne puisse ni ne veuille le faire, je le fais, d'ailleurs, lorsque je n'en ai pas et même quand j'en ai. Mais ils doivent apprendre très tôt le principe de base d'une telle structure, qui est à mon sens que tout le monde, et surtout le véto, en tant que plus haut "gradé" et responsable, doit savoir, et pouvoir, et accepter de "tout" faire [dans la mesure du raisonnable, des compétences, aptitudes et responsabilités de chacun bien sûr].


Quand je travaillais à F, où j'ai passé quatre ans (non j'exagère trois et demi ) d'affilée, que l'été j'étais toute seule en l'absence de mes employeurs, c'était moi qui appellais plombier ou électricien, qui plantais un clou pour remettre en place un  tableau, qui ouvrais l'appareil d'hématologie pour pratiquer la réparation préconisée à distance par le laboratoire producteur, qui négociais avec les clients mécontents. Le week end, de garde, je stérilisais mes instruments au fur et à mesure, faisais le ménage, sortais les animaux et nettoyais leurs cages.

Dont acte : il n'y a ni basse ni sotte tâche, il faut pouvoir "tout" faire.

 

J'ai été à leur place, d'ailleurs, sauf que j'étais un peu plus âgée puisque j'ai effectué un tel stage l'été après mon baccalauréat. Je me souviens avoir nettoyé mille fois la table, et l'otoscope, avoir nettoyé et stérilisé les instruments de chir, avoir répondu au téléphone. J'avais mal au dos à être tout le temps debout sans bouger, et les clients souriaient de me voir me saisir sans appréhension de chiens presque aussi lourds que moi.

 

Cette semaine, nous avons trois stagiaires mâles [oui, le stagiaire peut être de sexe mâle ou femelle, et parfois quand il a du mal avec l'explosion hormonale de la puberté, on est obligé de lui demander son prénom pour connaître son sexe. S'il s'appelle "Claude" ou "Dominique" on est encore plus ennuyé. Mais brisons-là et refermons cette parenthèse dont tout le monde aura admiré la profondeur et l'utilité.]

 

Trois ados bien propres sur eux [ouf, c'est pas toujours le cas], donc, qui bavardent entre eux de tout sauf d'art vétérinaire, mais bon, c'est certainement moi qui suis devenue sans m'en apercevoir une vieille c..., ne s'intéressent pas (ou alors ils le cachent bien), n'ont aucune initiative. Gloups, pas évident. Mais on s'en débrouille.


Le matin, alors qu'ils sont plantés à la porte de la salle de chirurgie où le Dr Z et moi-même sommes tous deux en train d'opérer, le Dr Z leur fait remarquer que c'est leur avant dernier jour et si ils ont des questions à poser pour leur questionnaire de fin de stage, c'est pas demain à 16 H 45 qu'on y répondra.

Je me permet un sourire de délices anticipés, j'avais oubliée la formalité du questionnaire...

Nos trois ados s'arment de leur liasse de feuillet et de stylos  et les questions s'enchaînent. Les questionnaires sont toujours les mêmes :

"Quel est votre métier, votre fonction  /  Quelle formation (études, diplôme) avez-vous suivi ?" Jusqu'ici c'est simple.

"À quel âge avez-vous choisi votre futur métier  ?" Moi c'était tard, vers 16-17 ans, j'apprends que Dr Z a ressenti la vocation à l'âge précoce de 9 ans.

"Existe-t-il une demande sur le marché pour votre métier ?" Hou là, hou là... Magnifique question pour lquelle j'entrevois bien une réponse, la même que j'aurais dû écouter y'a des années, mais bon... OK, je laisse Dr Z répondre...

"Quelles sont les satisfactions dans votre travail ?" Soupir. Faut toujours trouver une réponse suffisamment sirupeuse pour satisfaire ces charmantes têtes blondes qui, comme moi à l'époque, sont là par intérêt voir passion. Alors que les satisfactions en question, pour erratiques qu'elles soient en ce qui me concerne, sont si difficiles à décrire. Mais c'est bon, la réponse sirupeuse se trouve et en plus d'être sirupeuse elle est sincère.

"Quels sont les inconvénients de votre métier ?" Ah, t'as combien de lignes, là ? Une seule ? OK, oublie cette question...

...

À midi Dr Z et moi complètons leurs évaluations de stage, exercice qui s'apparente souvent à de l'équilibrisme parce qu'il convient d'être relativement honnête mais gentil quand même...


Un peu plus tard, le Dr Z rentré chez lui pour midi, je suis en train de manger avec   les deux ASV.

Zazouille : "Qu'est-ce qu'on va en faire cet après midi ? Je ne les veux pas avec moi à l'accueil !"

Tiphaine : "Ah, mais je ne les veux pas non plus avec moi au chenil, à rester plantés sur place comme des pots de fleur !"

Ok, ok.... Moi : "Et en consultations ?"

Zazouille "Ben c'est une idée, mais Dr Z les trouve aussi pénibles que nous toutes, et on ne va pas lui mettre les trois, ça fait trop."

Ok. Moi à nouveau  "Ben on en met deux avec moi, je me charge de les occuper, et le troisième avec Dr Z. Simplement, comme j'ai déjà "eu" Marko hier et il ne m'a pas convaincue, je préfèrerais qu'il aille avec Dr Z et je prends les deux José [Deux des stagiaires portent ce même prénom]"

Tiphaine "Ça ne va pas te faire trop ?"

Ben je ne vois pas trop où j'ai le choix et puis t'inquiètes je vais me débrouiller.

En fait l'aprés midi se passe bien. Mes deux stagiaires sont vifs et intéressés. À un moment où j'ai "un trou", je me plonge dans la rédaction de l'ordonnance de sortie du chat Pacha, à qui je dois prescrire un certain médicament.... Recherche dans trois bouquins de médecine véto différents et calculs divers pour la posologie puis dans le Vidal.... Tandis que je cherche, calcule et réfléchis, pour les occuper, je demande lequel des deux veut rédiger l'ordonnance. C'est José le roux qui s'y colle et qui sous ma dictée ["Alors... En haut à droite, tu écris la date.... Tu sautes une ligne et tu écris en toutes lettres "Pour le chat Pacha à Mr et Md ZZTOP...."] rédige une magnifique ordonnance d'une belle écriture ronde et moulée d'adolescent et sans fautes d'orthographe même si pour le coup j'ai un trou concernant le nombre de "l" dans "mililitres".


Le lendemain ils amènent des chocolats et repartent contents. C'est le principal.

Nous aussi on est contents. D'avoir reçu des chocolats, que ça leur ait plu et qu'ils soient partis.


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Dragond'eau En Quelques Plumes

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