Fut un temps où je connaissais le centre ville de F.... mieux que ses autochtones : depuis l'ancienne maternité près de la piscine où j'habitais, en passant à côté des anciens abattoirs depuis rénovés, en suivant les bords du canal (ou est-ce une rivière ? Je l'ignore...), pour parvenir aux rues piétonnes, aux places piétonnes à l'ambiance médiévale du centre ville avec les petits restaus dont la gourmande que je suis regardait toujours la carte, la citadelle où je balladais le toutou, laisse dans une main et balle de tennis pour lui dans l'autre.
Lorsque je sors du travail le soir, je passe dans les rues richement enluminées, j'adore. J'ai quitté F à la veille de Noël, il y a wouatmille ans. Il y avait moins de décoration à l'époque.
Image prise ici.
L'autre jour entre midi et deux, je suis allée faire un tour à pieds dans le centre ville, j'ai revu l'école de musique où je passais toujours tôt, avant de partir travailler, parce que dans le matin levant cette majestueuse bâtisse entourée de statues de fer forgé était superbe. Je n'ai jamais pris de photos.
Je m'interroge sur ma propension à raconter des anecdotes du passé avec tendresse, comme si j'étais sans cesse en train de me dire "c'était le bon temps".
J'y vois plusieurs explications possibles.
Tout d'abord, j'ai souvent du mal à goûter le moment présent.
L'autre jour, par exemple, j'étais au restaurant avec des amis, et j'avais envie d'être autre part, avec d'autres personnes. La première, je trouve ça très dommage ; il est vrai qu'au quotidien, je suis rarement en phase avec ce que je vis, j'ai plutôt tendance à penser à ce qui m'attend passée la porte, le prochain kilomètre, dans le prochain boulot ou la prochaine ville.
Je suppose que je devrais faire des efforts. Beaucoup de gens avec qui j'ai peu ou prou l'occasion d'en discuter me conseillent de savourer chaque instant et de ne pas sans cesse attendre autre chose. Je trouve ça gentil de leur part (j'adore les gens qui croient que leurs propres recettes s'appliquent à tout et tous) mais ça ne me correspond pas en permanence, c'est tout. Je suis peut-être trop exigeante, trop absolue.
Il y a pourtant des moments, des périodes, qui correspondent exactement à ce que je souhaitais / rêvais / attendais, parfois depuis des années, et que donc je savoure, déguste, explore de façon très intense au moment même où je les vis. Et ça, c'est le bonheur. Je pense en tous premier à tous les moments que j'ai passé chez le chercheur d'or récemment et avec lui, nos discussions, au téléphone ou l'un près de l'autre.
Ensuite, il est souvent difficile de raconter le moment présent, tout simplement parce que je souhaite conserver mon anonymat mais que beaucoup d'anecdotes que je pourrais raconter pourraient me faire reconnaître par leurs protagonistes, chose que je ne souhaite pas. Au fil des mois, je me suis pas mal dévoilée, et je suppose même que l'on pourrait certainement, en fouillant un peu, me retrouver. J'essaie quand même de faire attention à ce que je raconte, ce qui peut impliquer des (petites) tricheries.... Et en fait il est souvent plus facile de raconter ce qui est passé.
Enfin, tout simplement, j'ai tendance à ne conserver avec le passage du temps, que les bons souvenirs, ou presque. Si j'écoutais mes sensations internes, je pourrais croire que j'ai été très heureuse à F. Super heureuse, entièrement, à 200 % et que c'était "le bon temps".
Et en fait non, pas spécialement. Pas plus que cela. Mon employeur était un bonhomme assez peu sympathique, adepte du "diviser pour mieux régner" et qui pratiquais un harcèlement moral discret et insidieux mais réel. Donc, non, bien sûr, "tout" n'était pas rose. Mais à F... comme dans beaucoup d'autres périodes de ma vie et lieux où j'ai vécu, il y a eu beaucoup de bons moments, et c'est ceux-là qui restent. Ça ne signifie pas que je vive dans le passé, bien au contraire, mais que lorsque celui-ci se réveille, c'est surtout dans ses meilleurs aspects. C'est bien comme ça, je trouve